Le décyclage est-il une solution durable de traitement des déchets ?

Selon le rapport de la Banque mondiale publié en 2018, nous produisons plus de 2 milliards de tonnes de déchets urbains solides par an dans le monde. Avec la croissance démographique, le phénomène d’urbanisation et la logique de consommation mondialisée, ce chiffre ne cesse d’augmenter. Il pourrait atteindre 3,4 milliards de tonnes en 2050. Difficile d’imaginer l’étendue des dégâts ! Le défi à relever est de taille si nous ne voulons pas que notre planète se transforme en une immense poubelle à ciel ouvert. Le recyclage, c’est-à-dire la récupération des déchets industriels ou ménagers pour réutiliser leurs matériaux, est dans l’air du temps. Certaines marques nous le présentent comme le remède miracle qui nous permettrait de consommer toujours plus sans culpabilité. Malheureusement, nous sommes encore bien loin d’une parfaite économie circulaire. En 2018 en France, 44 % des déchets ménagers et seulement 27 % environ des déchets plastiques ont été recyclés. Ce que nous ignorons souvent est que la majeure partie des matériaux recyclés sont en fait décyclés ! Mais qu’est-ce donc que le décyclage ? Est-ce vraiment une solution efficace et durable de traitement des déchets ? Kalyâme vous aide à y voir un peu plus clair ! 

Pelle et bouchons à recycler - Source : CANVA

Le décyclage : on prend les mêmes et on recommence… mais en moins bien !

Le décyclage est une forme de recyclage. Le Code de l’environnement français définit le recyclage comme : 

« toute opération de valorisation par laquelle les déchets, y compris les déchets organiques, sont retraités en substances, matières ou produits aux fins de leur fonction initiale ou à d’autres fins. » 

En résumé, il s’agit d’utiliser certains matériaux issus des produits jetés pour fabriquer de nouveaux produits. Mais recycler, est-ce toujours valoriser ? Il n’y a rien d’évident à cela ! 

Le terme downcycling ou décyclage apparaît pour la première fois en anglais en 1994. Selon Reiner Pilz, ancien ingénieur allemand devenu architecte d’intérieur, tous les processus de recyclage ne se valent pas ! Il différencie alors le surcyclage du décyclage : si le premier fait gagner de la valeur à un produit, le second lui en fait perdre. 

Le terme « décyclage » a été repris en 2002, par William McDonough et Michael Braungart, dans leur ouvrage Cradle to Cradle. Créer et recycler à l’infini. L’architecte et designer américain et le chimiste allemand affirment qu’une grande partie de ce que nous appelons recyclage est en réalité du décyclage. 

En effet, avec le temps, les matériaux s’altèrent et ne peuvent être récupérés que pour fabriquer des produits de moindre qualité. C’est le cas des mélanges de plastique, des alliages d’aluminium, ou encore de l’acier des véhicules. Contaminé par le cuivre des câbles et l’étain présent dans les traitements de surface, il se dégrade progressivement. Ne respectant plus les exigences de qualité et de sécurité de l’industrie automobile, cet acier sera fondu et réutilisé dans le secteur du bâtiment. 

Si le terme « décyclage » n’a pas encore été ajouté au dictionnaire de l’Académie française, il est déjà présent dans celui de l’Office québécois de la langue française sous le nom d’« infrarecyclage ». Il est défini comme : 

« un recyclage qui transforme une matière résiduelle en un produit de moindre valeur, de moindre qualité, et dont la durée de vie et la possibilité d’entrer dans d’autres cycles de transformation sont généralement réduites. »

Usine de traitement de déchets - Source : CANVA

Une pratique pas toujours très éthique 

L’acquisition de produits décyclés sera toujours plus écologique que l’achat de produits entièrement neufs. Dans notre société de consommation en quête de croissance éternelle, le décyclage permet :  

• de réduire le nombre de déchets non traités, qui terminent brûlés ou en décharge ; 
• de diminuer la toxicité des déchets et ses conséquences sanitaires et économiques ;
• de limiter l’extraction de matières premières renouvelables ou non ; 
• et donc, de diminuer l’empreinte carbone liée à la fabrication d’un objet. 

Mais ce recyclage vers le bas n’implique pas seulement une baisse de qualité et de valeur des matériaux. Il s’agit en effet d’un processus qui reste polluant : 

• Le traitement des déchets est en général très énergivore : transport en camion, purification et transformation des matériaux, régénération de la matière recyclée avec de la matière neuve, etc.
• Les matériaux déjà décyclés sont souvent impossibles à recycler, comme le précise la définition québécoise.
• En nous faisant croire à une consommation durable, les marques nous jettent de la poudre aux yeux et cherchent à nous faire acheter davantage. Or c’est mathématique : plus on consomme, plus on jette et plus on pollue ! 

Prenons l’exemple du recyclage mécanique, ou plus exactement du décyclage des bouteilles en plastique. Elles peuvent être réutilisées pour fabriquer de nouvelles bouteilles en plastique (décyclage en boucle fermée) ou autre chose, des vêtements par exemple (décyclage en boucle ouverte). 

Dans les deux cas, il est en général indispensable d’ajouter du plastique neuf en quantité supérieure au plastique recyclé, pour garantir la solidité et la qualité des futurs produits. En effet, le plastique se détériore non seulement lors de son utilisation, mais également au cours du processus de recyclage. 

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’extraction de pétrole, matière première non renouvelable, est donc bien nécessaire à la fabrication d’objets recyclés ! 

Quant au destin des vêtements en polyester, il n’est pas très reluisant… Après avoir diffusé des microplastiques dans les eaux usées à chaque lavage, ils finiront probablement en décharge ou brûlés. C’est d’ailleurs le cas d’environ 65 % des vêtements jetés en France chaque année ! 

En ce qui concerne le papier recyclé, il n’est en réalité que partiellement recyclé : la dégradation des fibres de cellulose oblige les usines de recyclage à en ajouter des neuves. On n’a pas encore fini de couper des arbres ! 

Bref, quand il est pratiqué, le recyclage a ses limites que les marques se gardent bien de notifier sur l’emballage ! Ce qu’elles nous présentent comme un argument de vente indiscutable n’est en réalité que du décyclage, mis au service de leur croissance économique. 

Malheureusement, ce n’est pas nouveau : marketing rime souvent avec greenwashing !

Vêtements fabriqués à partir de matières recyclées. - Source : CANVA

Le surcyclage, une alternative plus écolo !

Dans notre société de consommation occidentale, mettre un objet à la poubelle est un geste banal. Tout s’achète, se jette et se rachète ! D’ailleurs, la mauvaise qualité des produits est même souvent une stratégie marketing pour nous faire acheter du neuf régulièrement. 

La prise de conscience de la problématique de la gestion des déchets dans le monde s’accompagne souvent d’un changement de notre rapport aux objets. Nous commençons à nous intéresser davantage à leur cycle de vie, leurs conditions de fabrication, leur coût social et environnemental. Chaque achat devient alors plus réfléchi, et est effectué dans une optique d’investissement durable. 

Bien sûr, réduire ses déchets à la source reste sans conteste la solution la plus verte. Pour cela, nous pouvons : 

• Éviter les emballages en privilégiant l’achat d’aliments en vrac et en utilisant nos propres contenants.
• Choisir des produits solides. La durée de vie de l’acier inoxydable, par exemple, est supérieure à 50 ans ! 
• Prendre soin des objets et réparer plutôt que jeter. C’est le moment de découvrir l’énorme satisfaction personnelle que peut apporter le bricolage !

Pour plus d'astuces, retrouvez nos 7 conseils pour une mode écologique et éthique !

Nous sommes de plus en plus nombreux à aspirer à un mode de vie plus sobre, et à privilégier la qualité et l’éthique à la quantité d’objets. 

Le surcyclage, ou upcycling, est l’opposé du décyclage. Les matériaux utilisés ne sont en général pas détruits et peu transformés lors du processus de recyclage. Ils prennent de la valeur, en maintenant leur qualité. Le surcyclage utilise très peu de ressources. Il va souvent de pair avec une démarche respectueuse des êtres humains et de l’environnement. 

On trouve des produits surcyclés dans le domaine de l’ameublement, de l’art ou encore de la mode. Des palettes en bois peuvent devenir de magnifiques meubles ou portails. On peut créer des bijoux avec du verre cassé, transformer des pneus de vélo usagés en ceintures ou des sculptures en ferraille. 

Kalyâme fait partie des entreprises éco-responsables engagées contre la fast fashion, l’une des industries les plus polluantes au monde, et le gaspillage. Elle vous propose de magnifiques accessoires de mode upcyclés… et uniques !

« Chaque fois que vous dépensez de l’argent, vous votez pour le type de monde que vous voulez. » Anna Lappé dans O, The Oprah Magazine, juin 2003

Malgré tous les efforts de recyclage à travers le monde, nous continuons chaque année d’extraire davantage de matières premières. Le décyclage, ou recyclage vers le bas, limite les dégâts, mais constitue une solution insuffisante face aux enjeux environnementaux actuels. La problématique de la pollution et du traitement des déchets est un immense défi pour l’humanité. Il est grand temps de remettre en cause la production industrielle de masse, et de considérer nos déchets comme de véritables ressources ! De déployer notre créativité pour les valoriser. De remettre au goût du jour un artisanat respectueux de notre environnement. D’acheter des objets uniques façonnés par des mains humaines, et avec un supplément d’âme… Et ça, ça n’a pas de prix ! 

Florence MALLET, pour Kalyâme

Sources : 

Produits textiles (TLC) | Ministères Écologie Énergie Territoires (ecologie.gouv.fr) : 65 % des vêtements jetés non recyclés. 

Consulter la Stratégie 3R pour les emballages en plastique à usage unique.pdf (ecologie.gouv.fr) 27 % 

économie circulaire | Ministères Écologie Énergie Territoires (ecologie.gouv.fr)